Le modèle Gaussien - Hauteur effective de la cheminée

Le modèle Gaussien - Hauteur effective de la cheminée

 

Richard Leduc, Ph.D. (AirMet Science Inc.)  

a 46 ans d'expérience en météorologie et qualité de l'air dans le domaine de la modélisation de la dispersion; il a développé un modèle lagrangien stochastique pour application en milieu densément urbanisé. Il a mis en place plusieurs programmes d'échantillonnage, publié des livres, articles, rapports etc. et donné de nombreuses formations. Il est Professeur associé bénévole à l'Université Laval. Amateur d'art et d'histoire c'est un collectionneur d'icônes et autres objets. Son odeur préférée est l’odeur du sapin baumier.

 

 

Dans le dernier numéro, nous avons introduit le modèle gaussien et l'effet de la vitesse du vent.

 

Revenons ici à notre remarque sur le vent.  Pour résoudre le dilemme de l'augmentation à l'infini de la concentration lorsque la vitesse du vent s'approche de 0 m/s, les calculs ne sont pas faits lorsque la vitesse est inférieure à un certain seuil, 1 m/s par exemple (4 km/h), ce qui exclut les vents calmes.  Ces cas sont ignorés: c'est une première limitation du modèle gaussien. 

 

Voyons maintenant la variable H dans le modèle, tel qu'illustrée dans Odomag, no 10.  

 

On y voit que H, appelée hauteur effective, est la somme de la hauteur de la cheminée (par rapport au sol) et d'un autre terme appelé le sur-élèvement.  C'est ce dont on discute dans ce numéro.

 

Dans Odomag 9 et 10, nous avons illustré diverses formes de panache sous diverses conditions de stabilité atmosphérique; dans le cas neutre, la forme qui ressemble à un cône, montre bien la forme du modèle gaussien.  La concentration du contaminant est naturellement la plus élevée au centre de ce cône fictif et ainsi une diminution de la hauteur de la cheminée équivaut à un rapprochement du cône vers le sol et plus la cheminée est basse, plus le nombre d’unités d’odeur y sera élevé, et inversement.  

 

La sur-élévation du panache est due au fait que l'effluent est éjecté de la cheminée avec une certaine vitesse verticale (appelée vs), ce qui lui procure une poussée lui permettant de s'élever.  En plus, l'effluent est souvent à une température (Ts) supérieure à celle de l'air ambiant (Ta), cette différence lui procurant une flottabilité permettant aussi au panache de s'élever.  

 

Au fur et à mesure que le panache s'élève et se déplace, sa température et sa vitesse verticale diminuent et, à une certaine distance sous le vent de la cheminée, il devient horizontal et son centre est la hauteur H, hauteur effective aussi appelée hauteur finale.  Pour simplifier la discussion, on se contentera de discuter de la hauteur finale, mais on peut aussi calculer comment s'élève le panache (son centre) entre la cheminée et le point où il atteint sa hauteur finale (on appelle cela la phase transitoire ou la sur-élévation graduelle).  

 

Voyons une manière simple de calculer H; plusieurs approches sont possibles et de nombreuses formules existent, dont plusieurs sont basées sur des observations.  De manière générale, on écrit:

 

 

où h est la hauteur physique de la cheminée (par rapport au sol) et Δh est la sur-élévation du panache, tel que montré sur la figure suivante, la flèche jaune étant h, la bleue étant Δh et la rouge H.

 

Une formule connue pour exprimer la sur-élévation est celle de J.Z. Holland, qui suite à des observations, a développé sa formule en 1953; sous sa forme simplifiée elle s'écrit 

où u (m/s) est la vitesse du vent au niveau de la cheminée, vs est la vitesse de sortie de l'effluent (m/s), Ts sa température (°K), Ta la température de l'air ambiant (°K), P la pression atmosphérique (mb) et la constante 2.68 * 10-3 a des unités en m-1mb-1.  Le premier terme représente la contribution dû à la vitesse de sortie (ou momentum) et le second celle dû à la différence de température (ou flottabilité).

 

On peut simplifier davantage cette formule en spécifiant la valeur de la pression P, par exemple en prenant P=1000 mb, ce qui représente une pression atmosphérique "moyenne".  On pourrait démontrer que P a peu d'influence sur le résultat.  Pour simplifier encore, on pourrait prendre une valeur fixe de Ta; c'est ce que l'on retrouve dans le Règlement 90 de la Ville de Montréal qui fixe Ta=298°K (25°C) et P=1000 mb pour obtenir:


Tel que mentionné précédemment, on y voit bien que si un effluent est éjecté avec une grande vitesse (vs), il atteindra une hauteur plus élevée que si sa vitesse est faible; de la même manière une grande différence de température avec l'air ambiant procurera une plus grande poussée vers le haut.  

 

Prenons des exemples pour illustrer cela.  Supposons une cheminée avec un diamètre de 1.5 m, une vitesse de sortie de l'effluent à 15 m/s, un vent de 3 m/s et une température ambiante de 25°C.  La figure montre que la sur-élévation passe d'environ 13.6 m à environ 24.2 m lorsque la température de l'effluent varie de 50°C à 250°C, soit une valeur environ 1.8 fois plus élevée.

Maintenant pour le même effluent, la figure suivante montre comment varie la sur-élévation en fonction de la vitesse du vent (u).  Dans cet exemple, la hauteur effective passe d'environ 26 m à 5.2 m lorsque le vent varie entre 2 m/s et 10 m/s, soit une sur-élévation 5 fois plus basse environ.  

 


 

Comme on le constate dans l'expression de la sur-élévation et sur la figure, un vent faible entraîne une sur-élévation plus grande qu'un vent fort, et inversement.  Ainsi, un vent fort rapproche le panache près du sol, ce qui devrait faire augmenter la concentration contrairement à ce que l'on a vu précédemment !!! 

 

En fait, pour la vitesse du vent, on a deux effets antagonistes: lorsque le vent est faible, on s'attend à une augmentation de la concentration suite à une dilution horizontale moindre et une diminution de la concentration suite à une augmentation de la hauteur effective.  Mais lorsque la vitesse du vent augmente, la hauteur effective diminue et on s'attend à une augmentation de la concentration mais aussi à une diminution la concentration due à la dilution accrue.  En fait, à partir d'une certaine vitesse de vent (appelée vitesse critique), l'effet de la dilution horizontale deviendra le plus important et la concentration diminuera avec la vitesse du vent (on y reviendra).  

 

Notons ici que le calcul de la sur-élévation dans les modèles de dispersion (tel AERMOD) sont effectués avec des procédures plus avancées (par exemple, la formulation de Briggs ) et que la formule de Holland que l'on a utilisée ici sert à titre illustratif vu sa simplicité.  Il en est de même de la forme simple du panache gaussien.

 

Dans le prochain numéro, nous verrons comment on calcule les concentrations.

Rédigé par Richard Leduc