À la rencontre de Jean-Christophe Mifsud

À la rencontre de Jean-Christophe Mifsud

 

Nous avons rencontré Jean-Christophe Mifsud lors de son passage à Montréal à l’occasion du 17ème Symposium international sur l'olfaction et les nez électroniques (ISOEN) (voir notre précédent numéro).

 

OdoMag
Neuro-chimiste de formation (vous avez soutenu une thèse en neuro-chirurgie) vous avez travaillé chez Lehman Brothers à New-York avant de créer une première compagnie que vous avez vendue pour fonder AlphaMOS en 1993 et produire le premier nez électronique. 


Qu’est-ce qui vous motive, Jean-Christophe Mifsud ?

 


L’Homme a toujours été au centre de mon attention. Lorsqu’en 93 je fonde AlphaMOS, les recherches que nous effectuons en partenariat avec l’Université de Warwick sont motivées par mon désir d’amélioration. Et comme “on ne peut améliorer que ce que l’on peut mesurer”, je me penche sur un domaine à la chaîne de valeurs complexe et je décide de trouver une solution qui permette une corrélation avec une perception sensorielle.

 

Nos premiers nez étaient utilisés en agro-alimentaire et en cosmétologie. Ils trouveront ensuite des débouchés dans le domaine de la santé et c’est seulement en 2004 / 2005 que nous avons lancé notre premier nez environnemental.

Jean-Christophe Mifsud

OdoMag
Pour quelle raison être sortie de votre zone de confort ? 

 


Le défi d’apporter une solution simple. J’ai toujours trouvé difficile d’admettre que dans le domaine olfactif, avant de pouvoir décider, il fallait prendre un échantillon, l’envoyer à l’analyse et que c’était seulement 3 ou 4 jours plus tard, une fois les résultats en mains, que le décideur pouvait trancher. Quand une odeur vous dérange, vous désirez résoudre le problème sur le champs.

 

Le défi s’est révélé ardu. Les nez électroniques sont, en eux-mêmes, un sujet complexe car ils font appel à plusieurs champs de compétence. Il y a, bien sûr, tout ce qui concerne les capteurs (sur ce seul sujet des dizaines et des dizaines de millions de dollars ont été dépensés) mais ces capteurs ne sont qu’un maillon de la chaîne. Il y a, également, le traitement du  signal, la corrélation avec le  sensoriel, la connaissance des  marqueurs (chaque domaine, que ce soit la santé, l’agro-alimentaire, l’environnement, etc. a ses spécificités qu’il faut connaître parfaitement).

 

Tous ces éléments forment une chaîne de spécialités et lorsqu’on parle de nez environnementaux, on ajoute à tout cela l’extraction d’une fluctuation dans une fluctuation ! Dans un sens, pour AlphaMOS,  c’était un aboutissement logique. Cependant le secteur de l’environnement n’a jamais représenté plus de 20 à 25% de son chiffre  d’affaires. Mais c’était un pas nécessaire, nous sortions du labo pour aller là où il faut prendre la décision.

 

Il est à noter que le secteur de  l’environnement est le seul où il  existe une norme dans le domaine de l’olfaction. Si vous prenez l’agro-alimentaire, par exemple, Pepsi et Coca ont chacun leur norme pour juger d’un sirop de fructose. Ce qui est “bon” pour l’un peut s’avérer “mauvais” pour l’autre.

 

En environnement, nous avons la norme EN 13725 qui régit l’olfactométrie dynamique et nous permet d’avoir des repères communs.

Jean-Christophe Mifsud

OdoMag
Aujourd’hui, vous avez quitté AlphaMOS pour fonder RUBIX…

 


Oui, comme je le disais au début, l’humain a toujours été au centre de mon attention et avec RUBIX, nous poussons l’exercice encore plus loin. Nous nous rapprochons encore plus de celui qui doit  prendre la décision et nous venons l'assister directement dans son environnement. Nous sommes avec lui, là où se trouve le problème et nous lui apportons les données qui lui permettent de décider immédiatement.

 

RUBIX tient compte de divers paramètres : température / humidité, bruit, lumière, particules (allergènes), gaz et odeurs. Il se décline à la fois à l’extérieur, où nous installons des capteurs (module WT1) et à l’intérieur où nous mettons les RUBIX Pod et ces deux systèmes vont faire remonter des données vers les serveurs (infonuagiques / cloud).

 

Imaginons un site d’enfouissement ou une station d’épuration des eaux. Il y aura un certain nombre de modules WT1 disposés suivant la topographie et les vents dominants et la compagnie pourra proposer des RUBIX Pod aux riverains qui désirent participer. Les informations extérieur/intérieur sont regroupées et analysées en temps réel ce qui permet au décideur confronté à un problème d’avoir immédiatement toute les information pour le résoudre.

 

Vous comprenez que les applications sont multiples. Par exemple, si vous avez des magasins dans plusieurs centres commerciaux, vous pouvez effectuer des comparaisons et juger de l’impact de divers irritants qui peuvent venir polluer l’expérience d’achat de vos clients. En milieu hospitalier, on va détecter automatiquement les odeurs d’urine, de détergent, etc alors que les patients peuvent également faire remonter leurs ressentis. On peut ensuite générer une cartographie qui permet, par exemple, de prévenir des crises et ainsi créer des environnement totalement sécuritaires pour les patients.

 

Dans les bureaux des grandes entreprises de services, dans les hôtels, les RUBIX Pod permettent une remontée d’informations des employés ou des clients et le système va aligner les données perçues avec les données mesurées. On établit ainsi une corrélation entre une réalité analytique et une perception. On va plus loin… avec RUBIX il est possible d’effectuer un monitoring intelligent des communautés urbaines. 

 

Comme vous le constatez, l’Homme a toujours été et reste au centre de mon attention !

Jean-Christophe Mifsud

Rédigé par OdoMag

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